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samedi 3 juin 2017

Paris : Saint Paul, Conciergerie, Rigoletto à l'Opéra Bastille



Une heure et quart pour rejoindre la gare TGV d'Aix, toute fleurie de coquelicots, ce qui me laisse le temps de boire un café avant de monter dans le train. Pendant mon attente, je vois plusieurs véhicules de fourrière enlever méthodiquement les automobiles garées le long des voies d'accès.





La gare d'Aix n'est pas celle de Kyoto, mais l'esprit est le même…


Trajet studieux à corriger des copies.

Installation au Royal Mad

J'avais l'intention de prendre le bus 61 en arrivant à Paris, mais finalement l'hôtel n'est pas si loin. Par la rue de Prague, Ledru-Rollin et Popincourt, mon trajet pédestre ne prend qu'une vingtaine de minutes.

Je m'installe donc au Royal Mad, rue Sedaine, un de ces typiques établissements parisiens aux chambres distribuées autour d'un escalier. Chambre simple mais récemment rénovée, fort propre, et avec réfrigérateur et four à micro-ondes.



Déjeuner chez Bombolo

Ce chaleureux restaurant tenu par une Liverpoolienne (ça se dit ?) et un Napolitain fait de vraies pizzas comme on en mange à Naples ! J'opte pour la formule à 16€, avec légumes grillés, pizza bianca, café accompagné de panna cotta et de tiramisu. J'y discute en italien tout le long, un vrai plaisir ! J'y retournerai.






Saint Paul-Saint Louis




Au départ, cette célèbre église n'était qu'un modeste édifice, dont la première abbesse fut Sainte Aure, représentée sur la façade.

Au Moyen-Age, son développement s'accentua et plusieurs rois de France y furent baptisés. Plusieurs reconstructions et restaurations après, elle est confiée aux Jésuites qui la marquèrent de leur empreinte.

Ajoutons à cela des conflits paroissiaux entre Saint Paul, Saint Louis (chapelle royale disparue, dont le patronage est revenu à Saint Paul) et la double Saint Gervais Saint Protais, une dose de vicissitudes à la Révolution, et on obtient un roman compliqué comme dans beaucoup d'églises parisiennes.



La nef articulée sur une coupole lumineuse est caractéristique du style.


C'est Victor Hugo, célèbre voisin, qui offrit les deux bénitiers de l'entrée.




Le transept montre des ensembles clairement jésuites. Ignace de Loyola, le fondateur de l'ordre, est célèbre pour son intense activité et impulsion de conversions dans le monde (les fameux missionnaires) et les statues d'Indiens emplumés,  convertis,  évoquent le phénomène.





Ce genre de scène me fait toujours penser à Candide de Voltaire !


L'autel principal est un bel exemple de récup'. C'est Baltard, l'architecte des Halles, qui le réalisa avec les restes de marbre du tombeau de Napoléon aux Invalides.


De l'autre côté du transept, un autel glorifie le culte, alors naissant, du Sacré Cœur de Jésus.


Le vrai trésor de l'église, c'est le chef-d'œuvre de Germain Pilon, à l'origine une commande de Catherine de Médicis pour un monument funèbre aux Valois.

L'idée originale de Pilon a consisté à garder la composition traditionnelle des Pietà (Vierge en voiles assise, composition strictement pyramidale), mais sans le corps de Jésus, et c'est cette absence alliée à l'expression bouleversante de Marie qui provoque autant d'émotion.


Saint Louis en trompe l'œil, dans le tambour de la coupole.


 Que voilà une citation pertinente, totalement inattendue dans une église !


 La chaire, en bois avec insertions de bronze doré, reste un modèle assez rare.


Il me faut m'abriter sous le parapluie, l'eau céleste déferlant subitement. 
Rue François Miron, je m'arrête devant les deux maisons médiévales (il en reste si peu à Paris).


Et, traversant la Seine, les vues me font soudain songer à Marquet.



Je gagne l'île Saint Louis, puis celle de la Cité.

Devant l'Hôtel-Dieu se tient un marché aux fleurs toujours agréable à traverser.





La Conciergerie 

C'est sur cette île, poste stratégique sur la Seine, que Clovis installa son palais, devenu siège du pouvoir royal avec Hugues Capet. Saint Louis et Philippe le Bel contribuèrent à l'agrandir.





Il ne reste aujourd'hui de ce vaste ensemble, actuellement distribué autour du Palais de Justice, que la Sainte Chapelle et la Conciergerie, et seulement les salles basses de cette  dernière.


La salle des gens d'armes,  merveille gothique du début XIVe, a conservé ses sobres cheminées.


Un escalier tardif conduit aux cuisines.


Cette pièce à quatre cheminées, construite sous Jean le Bon, était située côté Seine pour faciliter l'accès des denrées transportées par bateau. Ca devait bruisser d'activité pour nourrir deux mille personnes !



C'est depuis la salle des gardes qu'on accédait à la grand chambre où le roi tenait son "lit de justice", le tribunal royal.

Les piliers de la salle sont ornés de chapiteaux ; le couple représenté serait Héloïse et Abélard, les fameux amants médiévaux.




La Conciergerie reste cependant plus célèbre pour les salles de l'étage, la prison. Dès 1793 siégea ici le tribunal révolutionnaire qui jugea, grâce au zèle de Fouquier-Tinville (qui logeait ici et ne dormait que quelques heures par nuit), plus de 4000 personnes. Tous ceux qui étaient suspectés de trahir la République arrivaient ici, et une bonne moitié finit à l'échafaud. Sous la Terreur, la machine s'accéléra.

Tout cela donne à réfléchir. L'exposition présentée et fort bien conçue insiste sur le fait qu'il ne s'agit pas de totalitarisme, puisqu'il s'agit de préserver le bien public, la République, et non de profiter à une seule personne. On constate néanmoins que cette période d'apprentissage de la démocratie ne se déroule pas sans heurt. Et que finalement il ne faut pas s'étonner qu'il en aille de même avec les jeunes gouvernements démocratiques !



Le bureau du greffe : la paperasserie de l'époque.


La salle de la toilette où on coupait les cheveux pour faciliter la précision de la guillotine. Le docteur Guillotin inventa ce procédé pour éviter de faire souffrir les condamnés comme cela pouvait arriver avec la hache du bourreau.



La prison, ce n'était pas égalité pour tous, sinon pour la facture de l'exécution, adressée préalablement à chaque condamné ou à sa famille, comme aujourd'hui en Chine. Hormis cela, on se retrouvait à la paille (en salle commune, un nid à microbes) ou en cellule individuelle, parfois avec un meuble personnel, où on pouvait se faire apporter à manger ou recevoir des visites. Une question de moyens.


Serrures de la cellule de Robespierre.


La chapelle évoque tout particulièrement Marie-Antoinette, la reine détestée, accusée de tous les maux (même d'inceste avec son fils) et finalement victime expiatoire.








La cour des femmes permettait aux prisonnières autorisées de se dégourdir les jambes le matin.


Rigoletto à l'Opéra Bastille

La production de Claus Guth

Nadine Sierra, Željko Lučić

Claus Guth n'est pas metteur en scène habitué à se couler dans la tradition, c'est plutôt quelqu'un qui creuse et fait un vrai travail d'analyse. Son idée repose sur le flash-back : Rigoletto est devenu, après la mort de sa fille, un vagabond qui conserve précieusement les souvenirs de sa fille dans un carton. C'est à l'intérieur de celui-ci, démesuré, que se joue tout le drame auquel assiste le comédien impuissant, qui voit son double (le chanteur) se précipiter inéluctablement vers la catastrophe finale.
Beaucoup de bonnes idées, comme ces Gilda de différents âges qui finissent par s'éloigner de père, pendant Caro nome, ou le costume identique de Rigoletto et de Sparafucile, qui souligne le Pari siamo (Nous sommes pareils). Et les nombreuses projections apportent une réelle poésie.

La distribution du soir

La direction de Daniele Rustioni vaut surtout par ses couleurs, son soin apporté à la matière orchestrale : des cordes rugissantes pour le Cortigiani ou un hautbois ciselant poétiquement sa mélodie pendant Tutte le feste al tempio. Cependant il n'évite pas certains décalages ; la synchronisation choeur-orchestre aurait pu rythmiquement plus parfaite.

Kwangchul Youn, Željko Lučić

Bonne équipe de comprimari : le Ceprano de Mikhail Timoshenko (déjà excellent dans Wozzeck)  le Borsa de Julien Dran ou le Marullo de Christophe Gay (tous deux souvent entendus dans le Midi) montrent de franches vocalités, sonores, et de beaux timbres.

Robert Pomakov a beaucoup chanté  Monterone (je l’ai entendu à Marseille et à New York dans le rôle), c’est rare qu’une basse fasse sa spécialité de ce rôle qui comporte une belle scène, certes, mais fort courte. Marie Gautrot, la Giovanna, est tout à fait correcte. Difficile de briller dans ce rôle !

Vittorio Grigolo

Elena Maximova, Maddalena, commence mal avec des coloris un peu aigres, mais termine beaucoup mieux. Je l'avais néanmoins préférée dans Pauline à Lyon ou Carmen à Londres.

Curieusement, je n'ai entendu pendant des années Kwangchul Youn que dans ses superbes rôles wagnériens et maintenant c'est dans le répertoire italien (Trovatore et Guillaume Tell au Met) que je l'applaudis le plus souvent ! Il ne fait qu'une bouchée de Sparafucile, évidemment. 
Après sa délicate Pamina, Nadine Sierra était-elle de taille à se mesurer à  Gilda ?

C'est un éblouissement de bout en bout, avec une voix lyrique, une confondante maîtrise du bel canto, et une exquise musicalité. Une de mon top 5 pour le rôle !

Željko Lučić

Le ténor vedette Vittorio Grigolo dispose de nombreux atouts pour le  Duca di Mantova : un physique de jeune premier, des dons de comédien,  une voix solaire et assez facile, et une projection phénoménale qui me donne toujours l'impression qu'il chante avec un micro. Mais  cet avantage finit par devenir un défaut ; dans les ensembles, il couvre tout le monde. Dans le duo avec Gilda, on entend plus le ténor que la soprano, c'est un comble !
Et cette manie de coller des piani partout (le contraire du défaut précédent). J'ai parfois davantage l'impression d'assister à un festival Grigolo qu'à la partition de Verdi.
C'est là toute la difficulté de l'interprétation de l'œuvre d' art, ce fragile équilibre entre auteur et interprète.
Je conserve mes préférences pour les ducs les plus intègres quant au style, Alfredo Kraus, le jeune Roberto Alagna et Piotr Beczala. 

Nadine Sierra

Željko Lučić, Rigoletto, présente le cas inverse. C'est la troisième fois que je l'entends dans ce rôle, et indiscutablement celle où il est le moins à l'aise vocalement. Il est même contraint de chanter à la tierce quasiment tous les aigus du rôle. Mais quel comédien émouvant, quel artiste confondant ! Quelle musicalité ! Ce Qual vecchio maledivami, fondu en un seul legato.. Ces pauses qui savent faire naître l'émotion. Ces sons cotonneux pour mieux exprimer la douleur...
C'est vraiment un magnifique travail.

Nadine Sierra, Željko Lučić

Nadine Sierra

Elena Maximova, Robert Pomakov

Nadine Sierra, Vittorio Grigolo

Robert Pomakov

Daniele Rustioni

Julien Dran, Mikhail Timoshenko

Elena Maximova

Vittorio Grigolo

Željko Lučić

6 commentaires:

  1. Great post! I learn so much with your blog!
    Thanks
    Annie

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    1. A long time after, many thanks for your kind and constant support!

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  2. Must-see places in Paris ! Thanks for your post !
    Ally

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  3. I think one of the more romantic place to visit is Paris . I personally went there on my 1st anniversary and my husband and I loved the food and the people there!
    June

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    1. That's great, June. I wish a second trip in Paris for your second anniversary!

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