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mardi 18 avril 2017

Saint Petersbourg : Kunstkamera et Turandot au Mariinsky

La Kunstkamera depuis le pont

Après mon coucher tardif, lever de même, à 10.00. Le thermomètre affiche un glorieux +2°C, et il grimpera jusqu'à +5°C dans la journée !
Je traverse la Neva pour me rendre sur l'île Vassilievsky où je n'avais fait que passer l'an dernier.




Sur l'île Vassilievsky 

L'ambiance est différente ici. C'est plus européen, plus tranquille aussi. Il y a même des rues piétonnes !
Cette façade massive, ornée d'écussons, porte l'inscription Apteka (Pharmacie). Tout l'immeuble ? Difficile à croire.
 L'église Saint-André a été peinte en rose tendre, toujours rehaussé de blanc.


 Alors que j'en fais le tour, je tombe sur une procession, où les prêtres chantent fort bien.
J'ai tenté de filmer discrètement, le résultat vaut ce qu'il vaut... 

 De beaux légumes à cet étal, qui témoigne de choix artistiques assez naïfs...
C'est midi, je trouve évidemment une stolovaya juste devant moi.


220 roubles pour un feuilleté à l'aneth et des spaghettis aux boulettes. Les desserts ne sont pas très tentants, je verrai plus loin. 

 On se croirait à Vienne ! Le Margaretengürtel ressemble vraiment à ça.
J’entre dans un agréable café, pour commander un expresso et un genre de cake, au nom approximatif de pitchienn. Très bon en tout cas l'un et l'autre.

Kunstkamera

J'ai au programme la visite de cet établissement créé par Pierre le Grand, qui décida de faire entrer à marche forcée la Russie dans la modernité, à une époque où la pensée européenne était en plein changement. Il attira ingénieurs, savants, et tenta d'imposer la raison contre la croyance. Il œuvra pour que la ville nouvelle qu'il créait soit un modèle d'intelligence et de culture. 
Les premiers objets ramenés de ses voyages  furent d'abord exposés au palais Kikine, avant que ce lieu scientifique, où la tour abritait l'observatoire de l'incroyable savant Lomonossov, ne soit transformé en musée.
C'est donc le plus ancien de Saint-Petersbourg. L'Ermitage n'en devint un qu'après la Révolution, en exposant des tableaux confisqués aux Romanov et aux familles nobles du coin. 

De nos jours, les collections sont en gros divisées en trois parties. 

Les collections ethnographiques 

On peut admirer ici une grande quantité d'objets, souvent rares et intéressants, la Russie n'ayant pas été avare d'explorateurs. Si la partie africaine est bien conçue, les précédentes souffrent d'une muséographie datée.

L'Asie

Costumes mandchous du début du XXe siècle.
Le fameux pousse-pousse.
Ces grandes vitrines sont un peu rébarbatives.

Maquette d'origine, la vie dans un village chinois.
Bouddha thai, XVe - XVIe
La salle indienne.
Marionnettes et masques.
Tenue de théâtre, qui me rappelle fort une représentation de kathakali à laquelle j'avais assisté à Cochin, au Kerala.
Représentation de kathakali à Cochin, au Kerala. Le maquillage prend plusieurs heures par une chaleur accablante.


Impressionnant costume de démon.
Objets en papier mâché provenant du Cachemire. Cet état indien produit massivement, outre les écharpes, ces pièces peintes et les bijoux que nous trouvons chez nous comme "indiens" . D'ailleurs, en Inde, beaucoup de bijoutiers sont kashmiri.
Grande minutie dans la dentelle d'ivoire.
A comparer avec les bateaux en ivoire de morse vus il y a quelques jours !
Là aussi, je suis en terrain familier. J’ai vu en Indonésie beaucoup de ce matériel de chaman, avec lance magique et esprits des Anciens.
Et je retrouve ces armures de samouraï comme j'en ai vu beaucoup au Japon !
Tout le nécessaire pour la récolte du riz au Japon.
Divers jouets, toujours japonais.
Encore du même pays, des coquillages peints. Ca, c'est une découverte.
Une vitrine est consacrée aux Aïnous, ce peuple du Hokkaïdo qui vit encore traditionnellement.
La collection photographique est très réputée. Je me rappelle avoir vu sur ce sujet un documentaire sur Arte. Cette image d'un spectacle en Ouzbékistan m'a interpellé, car j'ai vu à peu près la même chose à Khiva ! La tradition demeure donc bien vivante.

A Khiva, dans la Medersa Rakhim Khan, en 2003
Scène de torture en Chine, dit la légende. 

L'Amérique du Nord

C'est surtout les régions septentrionales qui sont présentées, avec notamment beaucoup de vêtements. 
Première découverte, la Russie possédait des colonies sur une large partie de l'Alaska, du Canada et du Groenland. J'avoue la légèreté de mes connaissances sur l'histoire de ces régions. En tout cas, l'Alaska est carrément plus proche de la Russie que du reste des USA.

Vêtement imperméable en intestins de baleine.
On croirait une tenue de vol ! C'est en peau de caribou.
Celui-ci, en peau de poisson.
Chaman en plein travail.
Exposition fort rare illustrant la vie dans les îles aléoutiennes.

Les objets relatifs aux Indiens Tlingit ne sont pas en très grand nombre (il faut voir le Natural History Museum de New York pour ça) mais de bonne qualité.


Broderies réalisées par les "Indiens des plaines" 


Plus au sud, un Indien Pueblo trace des signes pour favoriser la culture du maïs.

Les célèbres poupées Kichina des Hopis. 


Assez incroyables tenues d'Indiens de Californie. Pour moi, du jamais vu !

L'Afrique 

La muséographie est bien meilleure, avec des panneaux qui délivrent des informations intéressantes. J'apprends ainsi que l'étude des langues africaines serait une spécialité russe ; chaque année, on envoie des missions relever du matériel linguistique pour décrire des  langues inconnues avant leur disparition totale, et étudier l'évolution des autres. 
Certaines n'ont jamais eu de mot pour la guerre (les pacifistes, ça existe) ; d'autres ont perdu les noms de certains animaux. Dans l'une, le même terme désigne aujourd'hui singe et girafe ! 
Vêtements d'apparat au Mali.
Ce sont parfois les hommes qui tissent.
Les caractéristiques masques du Bénin.

Images religieuses d'Éthiopie, la grande terre chrétienne d'Afrique. 

La science au temps de Pierre le Grand


Dans la salle de l'académie 

On a reconstitué la salle où se réunissait la fine fleur scientifique de l'époque. 

Machine pour observer l'électricité. On voit de semblables exemplaires au Science Museum de Londres et à celui des Arts et Métiers de Paris.
Table du petit chimiste.
Maquette reconstituant un atelier de chimie au XVIIIe siècle.
Tout cela rappelle les liens de nos Encyclopédistes avec la Russie, et que Voltaire et Diderot furent les invités de Catherine. 

Cabinet de curiosités 

Pierre le Grand fut, comme beaucoup, intéressé par ces cabinets de curiosités, qui assemblaient l'étrange et l'inconnu, un peu dans tous les domaines. 

Von Ruysch, qui mit au point des préparations pour conserver des spécimens (je présume qu'il s'agit de formol), permit de présenter pour de vrai ce qu'on se contentait d'évoquer par des gravures. Assez impressionnante collection de fœtus.


On put présenter le cerveau humain. Encore que j'imagine qu'à l'époque, où les morts brutales n'étaient pas rares, les gens devaient souvent voir des écrabouillés avec le cerveau répandu.


La partie la plus fameuse du musée, celle qui attire les foules, c'est ici, la "collection de monstres".
Aujourd'hui, je pense qu'il s'agit surtout de voyeurisme. Mais quelle était la motivation du tsar ? Un intérêt pour la tératologie ? La passion du collectionneur ? Une volonté de comprendre le fonctionnement du corps humain, jusque dans ces erreurs ?
Voici donc ce que bien peu de musées présentent. Âmes sensibles s'abstenir.



Au centre, une victime d'hirsutisme et à droite d'hydrocéphalie. Les yeux bleus sont extrêmement troublants !
De gauche à droite : siamois, queue de sirène, cercle de quintuplés.






Pause au Sicaffè

Je sors sous un ciel tout bleu et retraverse la Neva. 

L'arc de l'Amirauté.
L'Ermitage, bien sûr.
C'est fête aujourd'hui ! J'entre dans ce café sympathique et me remets à coup d'expresso et de strudel fromage blanc et cerises. J'y reste un bon moment à traiter mes photos.

La neige, sous le coup du soleil,  fond à vue d’œil. Un ciel d'été ! 

Cette fois, cavalier de bronze et cathédrale Saint Isaac se sont débarrassés de la couche de neige.

Turandot au Mariinsky

La façade est obstruée par les bus, je ne peux les expédier ailleurs pour la photo.


Le dossier en bois est un peu raide, dois-je avouer !

J'ai souvent écrit ici que je n'étais pas un grand fan de Puccini. J'ai de plus en plus de mal avec Madama Butterfly mais je garde une réelle admiration pour Gianni Schicchi, et j'ai toujours beaucoup de plaisir à voir Turandot.
Mes dernières représentations : à Vienne, au Volksoper (avec un superbe Neil Shicoff), une surprenante mise en scène française avec des insectes, et à Montpellier, avec un époustouflant Rudy Park, dans une sobre production de Yannis Kokkos.
Je m'attendais à découvrir ici encore une autre production.

Retrouvailles : une production familière


Turandot, Mariinsky
Altum présidant la scène au-dessus du cercle des enfants

Stupeur ! C'est une production que je connais bien, celle de Charles Roubaud, vue à l'origine à Orange avec Giovanna Casolla et le même Vladimir Galouzine, revue à Marseille à plusieurs reprises. J'y ai applaudi en Liu Kathleen Cassello, décédée la semaine dernière. Une pensée émue pour elle.
Ce n'est pas une mise en scène qui creuse vraiment l’œuvre (comme celle du Staatsoper de Berlin) mais elle offre un joli spectacle chorégraphié, et fonctionne efficacement.

Turandot au Mariinsky
Vladimir Galouzine avec les ministres
Mikhail Sinkevich dirige avec puissance un orchestre coloré, sans ménager les effets. Les fortissimi ne sont pas de la petite bière !
Altum est confié évidemment à un vétéran de la maison, Viktor Vikhrov, tout à fait idoine.
Le trio des ministres est composé de Yefim Zavalniy (Ping), d'Alexander Timchenko (Pang) et d'Oleg Balashov (Pong), tous excellents.
Yuri Vorobiev, Sarastro samedi soir, campe un Timur efficace, mais sa voix me paraît trop claire pour le rôle.
Irma Gigolaty est une Liù un peu décevante : voix trop mûre, jeu de scène incohérent (pourquoi agiter ainsi les bras dans Tu che di gel sei cinta ?).

Turandot au Mariinsky
La chorégraphie est une des bases du spectacle.
A 61 ans,Vladimir Galouzine met tous ses atouts au service de Calaf. C'est sans doute l'interprète que j'ai le plus entendu dans le rôle, et, même si le vibrato s'est élargi, il reste un chanteur de premier plan qui gère avec beaucoup de métier les pièges du rôle. Et sa voix hyper-couverte passe toujours aussi vaillamment un orchestre gigantesque.
Sa partenaire n'est pas davantage la jeune fille du livret. Maria Guleghina, 57 ans, a une vie d'artiste dans des rôles exigeants, et une pléiade de Turandot derrière elle. Eh bien, chapeau bas, elle aussi demeure une grande interprète du rôle, maîtrisant sa grande voix avec talent, et utilisant sciemment la production.
Un grand couple vedette, ça assure une bonne soirée de Turandot !
Turandot au Mariinsky
Maria Guleghina et Vladimir Galouzine devant le dragon formé de panneaux tenus par les choristes.
 Viktor Vikhrov
 Alexander Timchenko et Oleg Balashov
 Yefim Zavalniy
 Irma Gigolaty
 Maria Guleghina
  Yuri Vorobiev
 Vladimir Galouzine et Maria Guleghina
 Irma Gigolaty et Vladimir Galouzine
 Mikhail Sinkevich

 Alexander Timchenko
 Irma Gigolaty
 Mikhail Sinkevich
 Yuri Vorobiev

avec Maria Guleghina

12 commentaires:

  1. Ton blog est extraordinaire. C'rst bourré de photos qu'on ne trouve nulle part ailleurs et on a l'impression de voyager avec toi !
    Bises
    Michèle

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  2. enfin du ciel bleu qui permet d'admirer le bleu de la Neva,les é glises qui paraissent peintes de la veille.Merci pour cette agréable promenade et pour ce musée qui offre autant de curiosités.Bises.
    Mam

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  3. Bravo pour ce commentaire et félicitations pour les progrès ! C'est extrêmement gentil de faire tous ces efforts. Gros bisous

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  4. Photos incroyables. Ton blog permet de faire plein de découvertes !
    Bruno

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  5. Extraordinary post! Congratulations Fredailleurs
    Annie

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  6. Un tres bon article parfait pour prepare la visite
    Erouan

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  7. Merci pour ce très bel article avec des photos incroyables !
    Severina

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    Réponses
    1. Merci à vous, Severina, pour ce très aimable commentaire !

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